J’avais les pieds dans la neige et la tête dans les nuages.
Au mois de mai.
Dans les montagnes de la Nouvelle-Zélande.
Quoi demander de plus? Peut-être une petite éclaircie pour voir le sommet du volcan.
Je suis arrivée ici hier. Au mont Taranaki. Juste à temps pour jaser un peu avec les deux gentilles dames du centre d’informations touristiques.
« Quelle trail puis-je faire demain? Ma dernière bonne rando était de 20 km, je ne dis pas non à un défi du même style. »
« Ici on ne calcule pas en kilomètres, mais en heures. »
Ah? OK.
Je n’avais pas compris pourquoi.
Et avant de comprendre, j’ai décidé de jumeler deux boucles qu’elles m’avaient suggérées (de faire séparément).
La première débute par une montée abrupte vers le point de départ pour la Summit Track, la trail qui mène vers le sommet du volcan.
Pourquoi je n’ai pas choisi de faire la Summit Track? Parce qu’elle est fortement déconseillée à ce temps-ci de l’année. Avec la neige, c’est dangereux.
Et l’autre loop commence dans la Goblin Forest, pour ensuite longer la base du volcan.
La Goblin Forest. Ils l’appellent ainsi en raison des arbres recouverts de mousse qui s’accrochent les uns aux autres. Cela crée une atmosphère digne du film Twilight.

Les deux boucles se rejoignent au centre, et terminent par la même descente. Et cette descente-là, je l’avais faite la veille, aller-retour, tout de suite après avoir jasé avec les deux dames. Donc du déjà-vu, tsé…
Alors j’ai eu la bonne idée de jumeler la loop de 6 h avec celle de 4 h. Parce qu’après avoir fait quelques maths, j’ai conclu que, comme j’avais fait la fin en 1 heure la veille, l’ensemble de la chose devrait me prendre environ 8 heures. Ce qui s’est avéré exact, à une demi-heure près.
Ce que je n’avais pas pris en considération, c’est le niveau de difficulté des sentiers. Car j’ai maintenant compris ce que les dames de l’accueil voulaient dire.
Mais 8 h 30 et 17,5 km plus tard, je suis encore en vie (j’exagère un peu), et TRÈS contente de ma journée. Surtout très fière de moi. Car la première partie, elle était quelque chose! Et le milieu aussi. Et la fin.
Mais revenons en arrière.
Une journée de randonnée au mont Taranaki
7 h 30. North Egmont Car Park.
Je me suis levée avant le soleil.
Pour prendre le volcan en photo avec les premiers rayons de lumière. Car à cette heure-là, il était complètement dégagé (sinon j’aurais tendance à dire qu’il est très timide – toujours caché dans les nuages).
J’étais déjà sur place. J’ai dormi dans mon van. Dans le stationnement. C’est presque du luxe pour les véhicules certifiés self-contained comme le mien. On peut s’installer où on veut dans le stationnement (contrairement à d’autres sites où seulement quelques places sont réservées pour y passer la nuit. Dans ces cas, ça s’appelle premier arrivé, premier servi). Les toilettes sont restées ouvertes toute la nuit, il y a de l’eau potable et du wifi. Le luxe, quoi!

Café pris avec le soleil, déjeuner nourrissant englouti. C’est équipée de mes bâtons de marche, d’un gros lunch et de trop d’eau que je me suis lancée pour la première section de ma randonnée.
Oh, est-ce que je vous ai dit qu’il faisait 3 degrés quand je me suis levée? Ça devient un sujet récurrent pour moi. Il fait froid. En mai. Dans un van. En Nouvelle-Zélande. Et on dirait que je dois en parler à tout le monde! Ce qui fait aussi que j’essaie de rester au sec le plus possible. Parce que dans mon van, c’est humide. Et ça sèche pas. (Retenez ça.)
Une boucle à l’ouest du Taranaki/Egmont National Park Visitor Centre
Ram Track. Kaiauai Track. Kokowai Track.
Dans une forêt dense.
Par endroits, je ne voyais plus le sentier. Les herbes hautes (parfois plus que moi) bloquaient le chemin. Ça n’a pas été long que toute l’eau qui chillait sur ces herbes s’est retrouvée dans le fond de mes bottes. Pour le reste de la journée.
Des sections d’escalade. Dans la boue. Autant en montant qu’en descendant. Vous avez déjà fait du rappel sans corde?
Et (mon préf!!) un pont suspendu. Qui retenait plus de la trampoline que du pont. Assurément un de mes moments forts de la rando! (Notez l’avertissement très rassurant sur la photo…!)

Plus je montais en altitude, moins il y avait de végétation. Au plus haut point, j’étais bien contente de voir enfin du soleil, question de sécher un peu! Je venais quand même de passer 4 heures dans les herbes hautes, ne voyant parfois pas où je mettais les pieds. (Une chance qu’il n’y a pas de serpents venimeux en Nouvelle-Zélande…)
Holly Hut Track.
Ce bout de sentier longe la base du volcan. La ligne qu’on voit à travers les arbres sur la photo, c’est le sentier. Parfois sur la crête, parfois dans la forêt. J’ai vu plusieurs précipices – des deux côtés de moi. Ce n’était pas le temps de perdre l’équilibre!


Certaines sections étaient à risque de chutes de roches. Ne vous arrêtez pas pour les prochains… 100 mètres. Parfois 400 mètres. J’ai même vu 500.
Quand je suis arrivée à l’intersection que j’aurais dû suivre pour bien boucler la boucle de la première loop proposée, j’ai quand même décidé de continuer.
Malgré mes pieds bien mouillés.
Une boucle à l’est du Taranaki/Egmont National Park Visitor Centre
Humphries Castle Link Route.
Je voulais aller voir le Humphries Castle et la neige au début du sentier d’ascension. (Comme si on n’en voyait jamais, de la neige…)
Le Humphries Castle, c’est une des particularités qu’on nous présente sur la carte à la base. Et le sentier passe à côté. Alors j’étais curieuse de le voir, tsé. On le voit d’ailleurs sur les photos.


Au moment de prendre ma décision, il faisait gros soleil. J’avais enlevé ma tuque, mes gants, mon imper et ma doudoune. Une belle température, bref.
Rendue au Humphries Castle, j’étais dans les nuages. Et je ne voyais rien! Comme dans vraiment rien. Mais c’était quand même un moment magique. Seule, perdue sur la montagne.

Le nuage est resté avec moi jusqu’à ce que je redescende. On a traversé la neige ensemble. C’était zen. J’étais bien.
La dernière section par contre…
J’aurais pu terminer à nouveau dans la Goblin Forest. Maiiiis j’me suis dit que mes pieds étaient assez mouillés.
Il y avait une option plus rapide. Une route qui semblait être de gravelle, mais faisant partie de la Summit Track. Si ça fait partie de la Summit Track, ça doit pas être si pire, que je me suis dit. Alors, pourquoi pas?
Summit Track. Entre la Translator Tower et The Camphouse.
Pourquoi pas…
J’ai descendu une partie à reculons. Mes genoux hurlaient. Celles et ceux qui en ont des vieux comme les miens, soyez avisé.e.s!
Mais bon, c’est un détail. Parce qu’en haut, ça en valait la peine.
Les pieds dans la neige, et la tête dans les nuages.

Infos pratiques pour aller en randonnée au mont Taranaki
Résumé de ma journée
Distance
Un beau 17,5 km. À partir de la pancarte au début de la Ram Track. Et j’ai arrêté la montre lorsque je suis repassée au même endroit. Je pourrais ajouter à ça quelques mètres pour me rendre jusqu’à mon van.
Durée
Un gros 8 h 30. Incluant mes arrêts.
Un plus long pour dîner. Mais pas si long parce que le vent soufflait fort et que j’avais froid. J’aurais dû m’arrêter plus tôt, quand j’ai croisé un beau spot au soleil coupé du vent.
Et plusieurs petits arrêts au courant de la journée. J’ai pris mon temps en début de journée, pour admirer la forêt, et écrire. Et durant la descente finale aussi. Pour reposer mes genoux, et écrire.
Écrire. Cet article. Et d’autres trucs. Ne me jugez pas! Je prends l’inspiration quand elle passe. Au risque parfois de nuire à l’expérience par contre… J’en parle dans cet article :
Un blogue de voyage : quand la création de contenu éloigne du moment présent
Rédiger un blogue de voyage tout en restant dans le moment présent : un équilibre pas toujours facile à trouver.
Dénivelé
Je vous ai parlé de ma montre qui décide parfois de faire à sa tête? (Ou c’est l’utilisatrice le problème, ça se pourrait aussi.) Mais bref, je n’ai pas les données concernant le dénivelé que j’ai parcouru au mont Taranaki. Mais en fouillant un peu, j’ai trouvé que le stationnement serait à environ 950 m et le point le plus haut où je suis allée, le point de départ de la Summit Track, serait dans les 1500 m.
Et entre l’un et l’autre, j’ai monté et redescendu très souvent. Donc une bonne journée d’un point de vue du dénivelé.
Point de départ : Taranaki/Egmont National Park Visitor Centre
Boucle #1 : Kokowai Round Trip
Je l’ai prise à sens inverse. Il est normalement suggéré de débuter par la Holly Hut Track, de descendre la Kokowai Track, puis de prendre la Kaiauai Track, et de choisir entre la Ram Track et la route pour terminer. Ce trajet est estimé à 6 heures.
Boucle #2 : Tahurangi Translator Tower Round Trip
Je l’ai, elle aussi, prise à sens inverse. En terminant par la Translator Tower Track. Un trajet estimé à 4 h.

Niveau de difficulté
Difficile. Selon les sections.
Le Department of Conservation classe les sentiers sur 5 niveaux, du plus facile à expert. Les deux boucles que j’ai faites sont du 4e niveau, avancé.
Qu’est-ce qui m’a fait sortir de ma zone de confort?
De un, j’étais seule. Et en tout, j’ai croisé 3 personnes dans ma journée. (Dont un monsieur qui faisait son jogging dans la section la plus à pic de ma première loop… 🤯) Veux, veux pas, je prends moins de risques / je me sens un peu plus peureuse dans ce temps-là. Tsé, qui va m’aider ou appeler du secours si je tombe ou me blesse?
Et de deux, de trois, etc. Les herbes qui bloquaient le chemin le rendaient difficile à trouver. Les sections à pic boueuses rendaient la montée plus divertissante. Le fait d’être détrempée dès le début. Les sections à risque de chutes de roches où je devais rester alerte – et ne pas m’arrêter même si la vue de là était malade et que ça aurait fait une superbe photo. Le changement de température. En fait, LES changements de température. De n’avoir aucune visibilité en raison des nuages. Les sections très glissantes dans la neige. La descente finale qui a presque détruit mes genoux même si j’avais des bâtons de marche.
Mais on n’oublie pas que malgré tout ça (ou en raison de tout ça), j’ai adoré ma journée!

Meilleure période pour faire de la randonnée au mont Taranaki
L’été (décembre à février) est sûrement le meilleur moment pour faire de la randonnée au mont Taranaki. Mais comme j’aime bien ne pas croiser trop de gens sur les sentiers, y retourner, je viserais le printemps (septembre à novembre) ou, comme cette fois-ci, l’automne (mars à mai). En y allant peut-être un peu plus fin avril que mi-mai, pour de meilleures conditions au sol.
À ne pas oublier
- De bonnes chaussures de randonnée imperméables
- Des bâtons de marche
- Des vêtements chauds et imperméables
- Des vêtements de rechange
- Beaucoup d’eau et un bon lunch
- Une carte des sentiers (prendre celle de l’accueil en photo ou celle sur le site du Department of Conservation)
- Une lampe frontale au cas où la noirceur arriverait plus vite que prévu
- Un cellulaire en cas d’urgence
Je n’ai pas porté attention à savoir si j’avais du réseau durant ma randonnée, mais c’est toujours bien d’avoir un moyen de communication avec soi, on ne sait jamais. Surtout que Taranaki est un volcan dormant. Ce qui veut dire qu’il subsiste un risque d’éruption. Les probabilités sont modérées selon le Taranaki Emergency Management, alors mieux vaut s’informer en amont auprès de gens qui savent. De là le premier de mes conseils.
Conseils
- Vérifier la météo et discuter des conditions avec les employé.e.s au centre d’informations à la base de la montagne.
- Prendre en compte la difficulté du terrain et les conditions dans l’estimation du temps.
- Commencer la randonnée tôt pour profiter de la vue avant les nuages (et diminuer les risques de se faire prendre par la noirceur).
Dormir sur place
J’ai dormi sur place, dans mon van. Comme je l’ai fait dans plusieurs endroits en Nouvelle-Zélande. Le système de freedom camping y est vraiment bien développé. Différentes applications permettent de dénicher LE spot où dormir. J’ai principalement utilisé CamperMate.
Les informations que je donne plus haut par rapport à mon séjour au mont Taranaki datent de mai 2024. Je suggère de valider le tout sur les applications si vous avez l’intention d’y passer la nuit.
Mais! Il n’y a pas que le stationnement où dormir si on veut être près des trails pour commencer notre randonnée avec le lever du soleil.
Bien que New Plymouth et ses hébergements ne soient qu’à 30 minutes de route, il peut être intéressant de dormir directement sur place. Je ne l’ai pas testé, mais The Camphouse, bâtiment historique, traditionnellement utilisé comme bâtisse militaire, a été converti en hébergement de style dortoirs. Il se situe à la base de la montagne, tout près du stationnement où j’ai passé la nuit.
Et il y a aussi des refuges pour les randonnées de plusieurs jours…
Si j’ai la chance de retourner au mont Taranaki un jour
Je vais faire une des randonnées de plusieurs jours!
J’en ai spotté deux :
Le Pouākai Circuit. Une presque boucle (on revient sur nos pas à la fin) de 25 km, de niveau avancé, qui s’étale sur 2 à 3 jours.
Et le Around the Mountain Circuit. Une boucle de 52 km, de niveaux avancé et expert par sections, qui prend de 4 à 5 jours. Mais pour celle-là, je discuterais d’abord avec les gens au centre d’informations. Parce que dans sa description, ça dit que ça prend des compétences de survie… J’aime l’aventure, mais quand même jusqu’à un certain degré!
Le mot de la fin?
Une randonnée difficile.
Que je referais n’importe quand.
Oui, elle m’a fait sortir de ma zone de confort. Mais jamais à un point où je me suis sentie en difficulté. Le défi était juste parfait. Pour avoir du fun.
Et cette longue journée, je la termine dans mon van, au pied de la montagne. Avec un bon p’tit verre et un gros sleeping. En prévision d’une autre nuit au milieu de nulle part.
La belle vie! 💛

2 Responses
Wow! Comme c’est vivant et mouvementé comme récit! Captivant! Bravo Liliane, très réussi! Continue…
Merci!!🥰